jeudi 24 février 2022

Communiqué - Mise en difficulté du journal ARRITTI

 La ligue des droits de l’Homme s'inquiète des difficultés que rencontre l’hebdomadaire ARRITTI suite au non renouvellement de son habilitation à publier des annonces légales en Corse-du-Sud en 2022.

Depuis plus de 50 ans, ce journal s'inscrit dans le paysage médiatique de la Corse. Il vit également grâce au bénévolat de ses rédacteurs. Il démontre son utilité publique et comme toute presse, il contribue au pluralisme démocratique.

La Ldh demande au Préfet de Corse-du-Sud de reconsidérer la situation en vue de renouveler cette habilitation à l'exemple de la Haute-Corse afin de ne pas hypothéquer l'avenir du journal ARRITTI.


Message de Fabienne Giovannini :

Au nom de toutes les équipes d'Arritti, merci de votre soutien. Nous avons engagé bien sûr un recours gracieux. En attendant, nous perdons des recettes à chaque parution.

Nous avons lancé un appel à soutien, en proposant à tout non-abonné, un tarif promotionnel d'abonnement. Merci de le diffuser auprès de vos adhérents.
En vous remerciant encore de votre soutien,

dimanche 20 février 2022

 André PACCOU, délégué régional de la section, invité de la semaine sur Alta Frequenza à l'émission U Sguardu tous les matins à 7h45 et 12h10.  

mardi 15 février 2022

Soutien au médecin généraliste agressé à Lumio

 La ligue des droits de l'Homme apporte son entier soutien au médecin généraliste agressé à Lumio alors qu'il effectuait ses consultations à son cabinet.

Elle condamne l'agression physique dont cet homme a été victime ainsi que les propos d'exclusion et de rejet tenus par l'agresseur qui ont aussi visé son épouse.

Le témoignage de ce médecin rapportant une répétition de comportements agressifs à son encontre interpelle la communauté villageoise et au-delà la Balagne qui, comme beaucoup de territoires insulaires, manque de personnel soignant. Elle soutient la solidarité qui s'est exprimée. Cette répétition de comportements agressifs interpelle la justice. Une plainte a été déposée.

Eprouvée par la période de pandémie, la santé publique demeure un bien commun. Notre solidarité est plus que jamais nécessaire pour celles et ceux qui œuvrent à l'intérêt général.

Corse-Matin 17/02 :

dimanche 13 février 2022

MIREILLE DELMAS-MARTY : UNE EXCEPTIONNELLE CONSCIENCE, PASSIONNÉE ET VISIONNAIRE, DES DROITS ET LIBERTÉS

 MIREILLE DELMAS-MARTY : UNE EXCEPTIONNELLE CONSCIENCE, PASSIONNÉE ET VISIONNAIRE, DES DROITS ET LIBERTÉS

Communiqué LDH

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) est bouleversée par la disparition de Mireille Delmas-Marty, femme d’exception avec laquelle elle a toujours entretenu des rapports d’amitiés et d’inspiration réciproque avec de multiples initiatives communes.

Elle a porté toute sa vie durant, avec rigueur et vive intelligence, une vision humaniste de la société fondée sur la force de l’indivisibilité des droits et de l’Etat de droit qu’elle considérait comme « seul garant de nos libertés, face aux peurs et aux colères ». Encore récemment, elle était au cœur des débats publics en s’inquiétant de la multiplication des lois d’exception et de l’affaiblissement de l’institution judiciaire.

Son héritage reste plus que d’actualité avec des contributions qui sont des références pour tous les juristes et les défenseurs des droits. Il nous revient de poursuivre le chemin de justice et d’égalité qu’elle n’a eu de cesse d’éclairer.

La LDH présente ses plus sincères condoléances à sa famille et à ses proches.

Paris, le 13 février 2022

samedi 12 février 2022

Tribune « Notre jardin commun, la Méditerranée, se meurt, et nous ne pouvons rester silencieux »

Tribune

Collectif

Du Maroc au Liban, un collectif de vingt-cinq maires, à l’initiative du Marseillais Benoît Payan (PS), demande, dans une tribune au « Monde », que des normes plus sévères en matière d’émissions polluantes soient appliquées pour les navires croisant en Méditerranée.

Publié le 07 février 2022 à 05h30 - Mis à jour le 07 février 2022 à 07h12

Tribune. La Méditerranée est la mer de tous les passages et de tous les commerces depuis l’Antiquité : elle ne représente que 1 % de la surface des mers du globe, mais elle concentre 25 % du trafic maritime et 30 % du trafic pétrolier. Sa biodiversité est unique au monde, 500 millions de personnes peuplent ses côtes et, pourtant, le retard pris dans la protection de la nature et des populations est majeur. Notre jardin commun se meurt, et nous ne pouvons rester silencieux.

Maires de communes qui entourent la mer Méditerranée – ce patrimoine, berceau de notre humanité –, nous constatons tous les jours le drame écologique qui se noue. Nous l’avons affirmé en septembre 2021 lors du congrès de l’Union internationale pour la conservation de la nature [à Marseille] : la mer Méditerranée est un joyau en péril.

Le résultat est déjà sous nos yeux, le bassin méditerranéen est en première ligne face aux changements climatiques : canicules, inondations, sécheresses, incendies dévastateurs, montée des eaux. S’ajoute à cela la pollution de l’air causée par les bateaux, parfois hors d’âge, qui la traversent, et ceux qui y sont à quai.

Et ce sont ceux qui vivent grâce et auprès d’elle qui en paient le prix. Ces catastrophes climatiques et écologiques affectent notre nature et nos concitoyens, en particulier les plus fragiles. Face à la fatalité, nous opposons une volonté politique sans faille.

Notre mobilisation fait écho à celle des acteurs de la société civile, des Etats, de l’Union européenne et des institutions internationales.

Des navires obsolètes et dangereux

Ensemble, nous demandons l’adoption au plus vite d’une zone de réglementation des émissions de polluants atmosphériques, dite zone ECA, en Méditerranée, pour lutter contre la pollution de l’air des navires et réduire les pluies acides qui s’abattent sur notre mer et notre littoral. [Ce dispositif impose à tous les navires circulant dans le périmètre des normes plus sévères en matière d’émissions polluantes.] Une décennie après la mise en place de zones ECA sur les côtes est et ouest de l’Amérique du Nord, après également les Caraïbes, les mers Baltique, du Nord et de Chine, il est urgent d’agir. Par cet appel, nous voulons porter la voix des citoyens qui vivent en première ligne sur toutes les rives de la Méditerranée et peser sur les discussions qui auront lieu dans quelques mois.

Nous, maires des villes et ports méditerranéens, ne pouvons plus accepter la pollution massive engendrée par la circulation de navires obsolètes et dangereux, qui nuit gravement à la santé des populations, contribue au réchauffement climatique, participe à la perte de la biodiversité et mine l’attractivité de nos territoires.

Nous savons l’engagement, sur ces sujets, des ONG et des acteurs de la société civile, qui sont aux avant-postes des solutions, et des armateurs, qui pour certains sont en avance et arment des navires beaucoup plus respectueux de l’environnement et de la santé.

Nous demandons à l’Organisation maritime internationale d’approuver la mise en place de la zone de réglementation en Méditerranée. Nous demandons à nos gouvernements d’accélérer le processus actuel pour aller plus rapidement vers une zone ECA, réglementant non seulement les émissions de soufre et de particules, mais aussi les oxydes d’azote, dont la dangerosité est largement démontrée.

Nous le faisons par responsabilité vis-à-vis de la nature et de nos concitoyens, qui n’ont pas à être les victimes de ces pollutions. Nous le ferons ensemble et avec tous les acteurs qui créent, innovent, militent pour protéger notre Méditerranée, pour protéger le vivant. Nous sommes convaincus que nous pouvons être la solution. Autour de notre mer Méditerranée, comme dans le monde, il est temps d’agir pour tourner la page de l’irresponsabilité écologique.

Souad Abderrahim, maire de Tunis ; Luis Barcala, maire d’Alicante (Espagne) ; Kamel Ben Amara, maire de Bizerte (Tunisie) ; Marco Bucci, maire de Gênes (Italie) ; Michaël Delafosse, maire (PS) de Montpellier ; Francisco Manuel de la Torre Prados, maire de Malaga (Espagne) ; Mustapha El Bakkouri, maire de Tétouan (Maroc) ; Mounir Elloumi, maire de Sfax (Tunisie) ; Mohamed El Sherif, gouverneur d’Alexandrie (Egypte) ; Christian Estrosi, maire (La France audacieuse/Horizons) de Nice ; Hubert Falco, maire (LR) de Toulon ; Mato Frankovic, maire de Dubrovnik (Croatie) ; Hassan Ghamrawi, président de la communauté urbaine d’Al Fayhaa (Liban) ; José Francisco Hila Vargas, maire de Palma (Espagne) ; Mohamed Ikbel Khaled, maire de Sousse (Tunisie) ; Francesco Italia, maire de Syracuse (Italie) ; Jamal Itani, maire de Beyrouth ; Mounir Lymouri, maire de Tanger (Maroc) ; Nicos Nicolaides, maire de Limassol (Chypre) ; Leoluca Orlando, maire de Palerme (Italie) ; Benoît Payan, maire (PS) de Marseille ; Ivica Puljak, maire de Split (Croatie) ; Pau Ricoma Vallhonrat, maire de Tarragone (Espagne) ; Christian Santos, maire de Gibraltar (Royaume-Uni) ; Riad Yamak, maire de Tripoli (Liban).

dimanche 6 février 2022

Projection-débat autour du film "3000 nuits" de Mai Masri avec ALLINDI

A l'invitation d'ALLINDI, la section a co-animé la projection-débat autour du film "3000 nuits" de Mai Masri à l'Espace Diamant à Ajaccio, ce vendredi 4 février.

Sur la question d'une paix juste et durable au Proche-Orient, la section a rappelé l'analyse de Leïla Shahid, qui fut porte-parole de l'autorité palestinienne en France et ambassadrice de la Palestine auprès de l'Union européenne, concernant la "lâcheté des instances diplomatiques internationales" et la nécessité des combats portés par les sociétés civiles. Leïla Shahid : Cent trente-quatre États dans le monde nous reconnaissent, dont neuf pays européens. Sur le plan de l’opinion publique, c’est un succès, mais qui n’aboutit pas à mettre à la porte l’armée israélienne et à devenir souverain. Une conséquence de la lâcheté des Européens, des Américains et des Arabes, qui estiment qu’Israël est un État au-dessus du droit, refusant de l’obliger à quitter les Territoires.

La section a fait part de la mobilisation en cours avec l'enregistrement par la Commission européenne d’une initiative citoyenne européenne appelant à mettre fin au commerce avec les colonies illégales dans les territoires occupés comme la Palestine.

La situation demeure terrible en Palestine. Bande de Gaza toujours sous blocus israélien, extension de colonies en Cisjordanie et à Jérusalem, expulsion de familles palestiniennes au nord de la vallée du Jourdain, 4 500 prisonniers politiques palestiniens détenus fin 2021 dans les prisons israéliennes. 

Lire la tribune dont la Ldh est signataire « Le terme “apartheid” permet de penser dans la durée l’asymétrie des relations israélo-palestiniennes » 09/2021 - L’emploi de cette qualification juridiquement définie peut légitimement appuyer une démarche politique appelant Israël à répondre de ses actes devant la justice internationale, estime un collectif d’universitaires et de journalistes dans une tribune au « Monde ».

Lire l'article La LDH soutient le film « 3 000 Nuits », de Mai Masri :



Sortie le 4 janvier 2017

Années 1980, à la veille des événements de Sabra et Chatila. La révolte gronde dans une prison israélienne, où sont détenues des prisonnières politiques palestiniennes. Layal, une jeune institutrice de Naplouse, vient d’arriver, condamnée à 8 ans de prison pour un attentat dans lequel elle n’est pas impliquée. Elle partage la cellule d’israéliennes condamnées pour droit commun et s’habitue progressivement à l’univers carcéral. Mais Layal découvre qu’elle est enceinte. Envers et contre tous, elle décide de garder l’enfant.

Ce beau film, âpre, dur et émouvant, dénonce l’emprisonnement de milliers de Palestiniens de tous âges et origines dans les geôles israéliennes (près de 20 % des Palestiniens ont été détenus dans ces prisons à un moment ou à un autre). A travers le cas de l’héroïne inspiré de l’histoire d’une Palestinienne rencontrée par la réalisatrice, le film nous montre comment le recours à l’emprisonnement comme moyen de mettre un peuple à genoux ne fait que fortifier la résistance de ce peuple à l’oppression. En effet, cette jeune femme suspectée puis accusée de terrorisme parce qu’elle a aidé un jeune homme blessé, lui-même suspecté et arrêté, va peu à peu fraterniser avec ses compagnes de cellule dans la résistance menée malgré une répression féroce.

Le film montre également comment l’Etat israélien agit au mépris des droits de l’Homme à l’encontre des prisonniers et prisonnières, lesquel(le)s sont livrés au racisme et au sadisme de prisonnières israéliennes de droit commun et de matons, personnifiés en l’occurrence par une matonne quasi diabolique, assimilant tout(e) Palestinien(ne) au terrorisme.

Il y a un certain manichéisme à montrer d’un côté les prisonnières palestiniennes courageuses, humaines et solidaires et de l’autre les geôliers israéliens dénués de toute humanité, droits dans leurs bottes et franchement racistes. Trois exceptions viennent contredire ce schéma : il s’agit d’une avocate et d’une prisonnière israéliennes d’un côté, d’une jeune femme palestinienne traître à ses « sœurs » de l’autre. Mais on le sait, ces faits sont propres à toute situation de colonisation d’un peuple par un autre.

Ce film pour partie documentaire a été tourné dans une ancienne prison jordanienne. Certaines des comédiennes sont des actrices célèbres en Palestine et Jordanie et beaucoup d’autres sont des non professionnelles qui ont, soit connu elle-même la prison, soit eu un membre de leur famille en prison. La réalisatrice dit s’être appuyée sur leur expérience. Aussi, bien que réalisé avec des moyens réduits, le film, grâce à ces comédiennes ainsi qu’au professionnalisme de l’ensemble de l’équipe (chef-op, preneurs de son, monteuse et la réalisatrice elle-même) montre des qualités certaines mélangeant l’aspect brut du documentaire avec une esthétique poétique tirée de l’expérience carcérale elle-même.

Ainsi, si le cinéma ne peut à lui seul changer le cours des choses, au moins fait-il appel à notre sensibilité, notre humanité et notre conscience pour que nous nous mobilisions…

3 000 Nuits
Palestine, France, Liban, Jordanie, EAU, Qatar, 2015

Durée : 1h43
Réalisation : Mai Masri
Production : Intramovies
Distribution : JHR Films / Les films d’ici

Voir la Bande-annonce du film

mardi 14 décembre 2021

 La ligue des droits de l'Homme dénonce le tag inconséquent et odieux inscrit sur la façade du centre de vaccination du Casone à Ajaccio.

Elle apporte son plein soutien aux personnels de santé de ce centre comme à tous leurs collègues qui travaillent sans relâche pour accueillir, pour informer les patients, pour procéder aux tests et vacciner tous les jours de la semaine.

La période éprouvante que nous vivons depuis deux années ne peut entamer les solidarités.

Corse-Matin 15/12



mercredi 24 novembre 2021

Hommage

 La ligue des droits de l'Homme apprend avec une grande tristesse le décès de Thierry QUILICI, infirmier anesthésiste à l'hôpital de la Miséricorde, sapeur-pompier volontaire, qui a mis fin à sa vie sur son lieu de travail.

A travers son geste terrible, nous entendons la détresse de cet homme que nous connaissions toutes et tous pour son entier dévouement au service des autres. Son geste est une interpellation grave. Nous savons qu'il intervient dans un contexte de crise de notre système de santé public précarisé depuis des décennies et miné par la pandémie.

La LDH se joint à la peine de ses trois enfants et de sa femme. Elle leur adresse, ainsi qu'à leurs proches, ses sincères condoléances.

samedi 13 novembre 2021

Famille Syrienne exilée

 Corse-Matin 13/11


Concernant la prise en charge de la famille syrienne à Porto-Vecchio, une association avance que la "loi républicaine" a été "bien appliquée" par la préfecture.

Selon les informations que nous avons recueillies et publiées, la Ldh ne peut aller dans le sens de cette affirmation.

En effet, les dix personnes, dont deux enfants en bas âge, ont été placées en rétention de façon irrégulière,  privées de liberté sans accès à leurs droits. Du mercredi au vendredi, jour de leur transfert au CRA de Marseille, ces personnes n'ont pas eu accès à un avocat, ni reçu d'information sur leur situation par une association dédiée, ni eu accès à un médecin comme le prévoit la loi lorsqu'un arrêté de rétention administrative ou de placement en zone d'attente est pris.

Nous rappelons que de façon régulière dans cette situation, la bâtonnière aurait dû être saisie pour désigner un avocat qui se rende auprès des personnes retenues. Ce qui n'a pas eu lieu.

Enfin, lorsque le juge des libertés et de la détention prononce la libération des dix personnes le dimanche matin à Marseille, il le fait en raison de la non motivation de la requête de prolongation du préfet et au nom de l'intérêt supérieur des enfants. Nous soulignons également que le parquet n'a pas fait appel de cette décision de libération du JLD.

France 3 Corse Via Stella

Corsenetinfos

mardi 9 novembre 2021

Hommage à Michel TUBIANA

Ecouter la Cérémonie d'hommage à Michel TUBIANA le vendredi 5 novembre à la Maison du Barreau de Paris.

Hommage d'André PACCOU à Michel TUBIANA :

"Cher-e-s ami-e-s,

Ce soir, Michel nous lance une belle invitation. Au travers de son parcours militant, il nous convie à voyager parmi les hommes et leurs combats pour davantage d’humanité à conquérir et à partager. Et c’est en Corse qu’il me demande de vous emmener à la rencontre de cette petite terre au milieu de la Méditerranée, sa mer. Michel était un enfant de la Méditerranée.

A quoi pensait-il, lorsque venant en Corse, entre réunions publiques, conférences de presse, rencontres avec des élus, il se posait quelques instants et contemplait au loin le ciel se confondre avec la mer, le regard projeté vers l’autre rive. Je suis convaincu que c’est de cette autre rive, au plus profond de lui, dans son histoire algérienne que Michel nourrissait ce qui fut « son plus beau travail d’homme, celui d’unir les hommes », celui d’œuvrer pour la paix.

Pas de ces fausses paix qui à peine signées grimacent derrière le dos des hommes préparant de nouvelles guerres. Mais la paix-concorde qui va chercher ce qu’il y a de meilleur chez les hommes : la fraternité.

Michel était convaincu que cette recherche était profondément une affaire de femmes. Je n’oublie rien de ces moments partagés avec Souhayr Belhassen et Michel, avec Leïla Chahid et Michel, en Corse, ce petit jardin de notre maison commune, la Méditerranée, où on parla de paix au Proche-Orient et de printemps arabes contre des tyrans.

Ce fut avec la même conviction que Michel s’engagea à la fin des années 90 contre les assassinats entre nationalistes, véritable défi à l’avenir de la société corse toute entière. Il affirma avec force le soutien de la LDH au Manifeste des femmes corses contre la loi des armes.

La paix-concorde que portait Michel dans ses combats avait un fondement premier : la reconnaissance de l’autre, son égal, notre égal, son émancipation et donc notre émancipation. En Nouvelle Calédonie, en Palestine, au Pays Basque. Et en Corse, avec le peuple corse à qui il souhaita « longue vie » à l’issue du colloque national « La Corse en mouvement » organisé à Ajaccio en octobre 2001 sous sa présidence à la tête de la ligue des droits de l’Homme. Nous étions alors dans un dialogue à peine renoué entre la Corse et le gouvernement près de quatre ans après l’assassinat du préfet Claude Erignac qui fut suivi d’une répression hors norme pendant dix-sept mois.

Ce colloque fut un moment important. Il rappela la dimension politique de la question corse au sein de la ligue des droits de l’homme, au cœur de la relation entre le singulier et l’universel. Il trouva sa conclusion par l’adoption d’une résolution au congrès de Niort en 2013 « République, diversité territoriale et universalité des droits » qui actait l’existence du peuple corse, revendication désormais commune à toutes les ligueuses et à tous les ligueurs de France.

Enfin, dernière étape de notre voyage en Corse, une étape douloureuse, avant quelques mots de conclusion. Une étape pour dire un autre engagement indélébile de Michel : sa solidarité avec les ligueuses et les ligueurs de Corse, une solidarité partagée au creux de la plus profonde des peines : l’assassinat d’Antoine Sollacaro, grand avocat, militant nationaliste qui fut président de la section de Corse de la LDH au début des années 90. « Un homme révolté contre toute forme d'injustice » pour reprendre ici l’intitulé de la tribune de Michel parue dans le journal Le Monde au lendemain de cet assassinat.

Je garde en mémoire comme un présent la proposition que me fit alors Michel de co-signer cette tribune comme on fait une accolade affectueuse à des amis, à Christine, à moi-même et à nos enfants, meurtris par la disparition violente d’un être cher. Imaginez Michel dire les mots qui vont suivre. Ecoutez la gravité de son propos.

 « La faute des autorités publiques n'est pas d'être inactive : c'est d'avoir confondu, depuis des décennies, le maintien de l'ordre et la paix publique, d'avoir cru que les rodomontades autoritaires pourraient pallier le sous-développement économique, le tourisme de carte postale ou les petits arrangements entre amis érigés en mode de vie. Au point où, maintenant depuis trop longtemps, les frontières deviennent floues entre l'action politique de certains, les intérêts d'autres et le souci des pouvoirs publics que tout cela reste un folklore à dominante locale, faisant de la Corse et de ses habitants, les pensionnaires d'un vaste zoo à ciel ouvert que les vacanciers viennent regarder vivre avec leurs drôles de mœurs et de coutumes …

On ne peut s'en prendre aux carences de l'Etat sans en même temps interpeller la société corse sur ses ressorts et ce qui fait qu'il est possible qu'une communauté de 300 000 personnes tolère que les cadavres parsèment ses rues et ses chemins. Cette espèce d'hymne à la mort qui est fredonné depuis des décennies par les milieux les plus divers n'a pas encore trouvé son frein naturel, c'est-à-dire son rejet par la communauté elle-même. Non que l'indignation ne soit pas sincère, comme elle le fut à d'autres occasions, mais plus simplement l'acceptation tacite d'une sorte de rite qui va de pair avec d'autres stigmates.

Et de conclure la tribune par cet appel : « A la société corse de montrer qu'elle ne reconnaît pas le droit d'abattre quiconque comme un chien. C'est bien le moins que l'on doit à la mémoire d'un homme qui aima son pays et la liberté. »

Michel avait l’âme d’un dreyfusard. Chacun sait la profondeur de cet engagement, l’humain et le politique enlacés, confondus, inséparables. Michel était un humaniste militant. Ce soir, évidemment, nous sommes tristes mais nous avons le privilège d’avoir partagé tant de voyages avec Michel."

Ajaccio, le 31 octobre 2021,

André Paccou

 


L’avocat Michel Tubiana, lors d’une conférence de presse, à Ajaccio, en 2010. STEPHAN AGOSTINI / AFP Le Monde Publié le 02 octobre 2021