Marchons
contre le racisme
Déclaration de la Ligue des Droits de l’Homme
Déclaration de la Ligue des Droits de l’Homme
Nous
sommes rassemblés ce matin à Ajaccio et Bastia pour dire non au racisme.
Nous
répondons à un appel national, lancé il y a quelques jours, « Marchons
contre le racisme ».
La
première phrase de cet appel s’impose comme une évidence
inquiétante : « Un climat nauséabond s’installe dans notre
pays ».
Plus de
40 organisations en Corse ont répondu à cet appel.
Les
attaques racistes proférées contre la garde des Sceaux, Madame Taubira, par une
candidate du Front national, reprises sous forme d’invectives d’enfants
téléguidés par leurs parents, puis à la une d’un journal d’extrême droite, sont
une souillure pour la République.
Ils
agressent des millions d’êtres humains originaires d’Afrique, des Caraïbes, des
Amériques, de l’Océan indien, citoyens français ou non, et dont les
aïeux ont été jadis martyrisés du fait de leur couleur de peau.
Notre
rassemblement, nos rassemblements sont d’abord une condamnation solennelle de
cette dérive raciste.
Ils
sont aussi la volonté de dire que, face à la dégradation, au chômage et aux
inégalités, ceux qui veulent aviver les souffrances sociales, les peurs et les
colères, nous trouveront en travers de leur chemin.
Nous
n’acceptons pas la banalisation de la haine raciste.
Nous
savons que les faiseurs de haine ont un objectif précis : diviser les
pauvres entre eux, inciter les citoyens à s’affronter entre eux.
Pour
notre part, nous affirmons l’égalité, la solidarité, la fraternité.
Nous
devons mettre nos forces au service de l’unité des citoyens et du combat pour
le partage des richesses.
En
Corse aussi, nous devons combattre les dérives racistes et la banalisation de
la haine.
Il y a
des actes, certes sporadiques, mais qui doivent inciter à la plus grande des
vigilances :
- Cet
acte odieux d’une peau de sanglier ensanglantée, clouée sur la porte d’un lieu
de culte musulman, il y a quelques jours, en Balagne ;
- L’incendie,
il y a quelques mois, d’un autre lieu de culte à Ajaccio ou encore des
graffitis racistes sur le local du consulat du Maroc à Bastia
Dans
d’autres lieux publics aussi, il y a des graffitis racistes, que les autorités
publiques concernées devront s’empresser de faire effacer, qui mélangent des
messages anti-arabes et des croix gammées.
Certains
y verront de la confusion dans les esprits de ceux qui souillent nos murs.
Pour
notre part, nous constatons une continuité, une terrible continuité de l’histoire
entre le racisme et l’antisémitisme.
Oui, en
Corse aussi, nous devons être vigilants lorsque des blogs développent des
messages ethnicistes, au nom d’une Corse chrétienne.
L’engagement
autour de notre appel, de personnes au titre de leurs convictions religieuses,
est la réponse à ce discours d’exclusion.
La
société corse est laïque.
Elle
fait le choix de la liberté de conscience.
Chacun
est libre de choisir ses convictions religieuses et philosophiques.
Catholiques,
musulmans, juifs, protestants, athées veulent vivre dans la fraternité, dans le
respect des uns et des autres.
Enfin,
en Corse, il y a le Front national.
Nous
n’oublions pas les scores de Marine Le Pen au premier tour des présidentielles.
Ici, à
Ajaccio, la candidate du FN est arrivée en tête dans 20 bureaux de vote parmi
les 40 que compte la ville.
Nous
n’oublions pas les dizaines de communes en Corse qui ont placé Marine Le Pen en
tête lors de ce scrutin.
Certains
pensent « oui, mais le front national n’a pas d’implantation locale réelle
en Corse ».
Ne
jouons pas avec le feu par manque de vigilance.
Le Fn
n’est pas un parti comme les autres :
- De par
son origine, le regroupement dans les années 70, de collaborationnistes,
d’enfants perdus de l’OAS, de groupuscules néofascistes…, une
origine que Marine Le Pen assume sans problème ;
- De par
son objectif politique premier, la préférence nationale, qui vise à
institutionnaliser l’inégalité entre les citoyens ;
- De par
ses alliances au niveau européen avec des partis xénophobes.
Ne
laissons pas ses idées se diffuser quel que soit le contexte électoral.
Nous le
répétons, les souffrances sociales, les peurs et les colères peuvent être
exploitées sans limite par l’extrême-droite.
Il faut
ici saluer la présence de tous les syndicats qui constituent les outils, les
conquêtes démocratiques que les citoyens doivent faire vivre pour défendre la
justice sociale, l’égalité sociale et la solidarité.
Mesdames
et Messieurs, vous l’aurez compris, notre présence ce matin, est une réponse à
une situation inquiétante.
Mais
nous ne pouvons en rester là.
Chacun,
dans son organisation, doit porter le message de fraternité de ce matin,
au-delà de nos rassemblements.
La
mobilisation aujourd’hui en Corse, mais aussi dans 90 villes en France, de
centaines d’organisations, organisée en quelques jours, démontrent qu’une prise
de conscience est au rendez-vous..
L’insuffisance
de manifestants dit également qu’il nous faut ancrer cette prise de
conscience dans le mouvement social et civique.
Nous
aurons besoin d’autres rendez-vous, ensemble, pour dire non au racisme et à sa
banalisation.
Je vous
remercie.
Ajaccio,
le 30/11/2013
André
PACCOU
Elu
national de la LDH