mardi 22 avril 2014

Conférence de presse de la section : Municipales 2014, quel bilan et quels enjeux aujourd’hui ?


     Situées à la charnière des dernières élections présidentielles et des prochaines élections territoriales, les élections municipales ont constitué un moment politique important.  Elles ont bousculé la donne politique. Nous aborderons essentiellement  la situation en Corse, sans ignorer toutefois le contexte national marqué par une abstention massive ; un désaveu de la politique gouvernementale ; l’installation du FN dans le paysage politique, sans toutefois ruiner l’UMP qui gagne de nombreuses villes, mais aussi des intercommunalités et des métropoles.  En Corse, la LDH se félicite en particulier du taux de participation à ces élections et de la marginalisation du FN. Mais cette satisfaction  trouve vite ses limites. Plusieurs autres constats indiquent la nécessité de redonner sens à la démocratie.
Une démocratie qui demeure fragile
Dans certaines communes, l’importante augmentation du corps électoral, en partie liée à l’explosion du nombre de résidences secondaires, interroge sur la possibilité des résidents permanents de peser sur le choix de leurs élus, et d’être, par le moyen de la démocratie représentative, les décideurs des politiques locales. Se pose ici l’urgence de la définition d’une nouvelle citoyenneté fondée sur la résidence, entendue au sens d’installation durable en Corse.
A ce sujet, il faut noter encore et toujours le peu de candidats issus des immigrations qui répondent à ce critère d’installation durable ; et par conséquent, une représentation tronquée du peuple corse en tant que communauté de destin au sein des conseils municipaux et communautaires. La LDH rappelle également que le droit de vote et d’éligibilité pour tous les étrangers n’a toujours pas droit de cité.
L’inflation des votes par procuration pose un véritable problème. Elle ouvre la porte à la suspicion sur la sincérité de certains scrutins. Elle suscite des contestations légitimes. Elle laisse entrevoir de possibles manipulations. Elle jette le trouble dans une société qui a besoin de sérénité. Le vote par procuration, réponse inadaptée à l’abstention sur le reste du territoire national, se substitue aujourd’hui, en Corse, à une autre dérive clanique, qu’il a fallu combattre, il y a quelques décennies, le vote par correspondance.
Enfin, à l’occasion de ces municipales, on a vu resurgir des propos antinationalistes d’un autre temps qui ont choqué bien au-delà des personnes visées. De même, le préalable à la violence a été réactivé alors que l’organisation mise à l’écart,  participe par ailleurs à la vie démocratique. Ce n’est pas acceptable. La LDH en appelle à l’abandon de telles pratiques qui tournent le dos à l’apaisement et donc au développement démocratique.
La démocratie a besoin de débats de fond
La LDH se demande si l’excès de jeux politiciens ne l’a pas emporté sur les débats autour de projets. Fort légitimement, l’objectif, pour chaque liste en présence était d’accéder au pouvoir. Mais les élections sont un moment privilégié pour confronter différentes projets. Cette confrontation et le pluralisme politique sont nécessaires ; aux citoyens, ils offrent des repères qui donnent sens à la démocratie.
De même, les conditions d’un renouveau démocratique impliquent de sortir du clanisme. Si il est nécessaire, le vote contre le clan n’est cependant  pas suffisant, si il ne se nourrit pas d’une alternative démocratique, d’un projet clairement identifiable.
La démocratie a besoin de l’Etat de droit
L’assassinat de Jean Leccia, le soir du premier tour des municipales, trois ans après l’assassinat d’un élu au soir du premier tour d’une autre élection, et au cœur de la campagne électorale, la distribution dans le Valinco, d’un tract anonyme, portant de graves accusations contre des personnes nommément citées, rappellent la fragilité de notre démocratie face aux processus de criminalisation qui minent notre société.
Il revient à l’Etat d’assurer la sécurité des citoyens, d’en finir avec l’impunité, sans remettre en cause leur liberté, sans recours à des méthodes dérogatoires au droit commun.
Il revient aux citoyens de dire leur refus de cette violence criminelle qui vise particulièrement leurs élus. Les citoyens ont également la responsabilité d’exiger de leurs élus le respect de la loi, la  transparence, et de nouvelles pratiques démocratiques. Ils doivent être associés à la définition des moyens qui permettront de mieux maîtriser notre développement.
La Corse doit avancer pour ne plus régresser
Au lendemain des élections municipales, marquées par une victoire de la droite, certains de ses leaders sont passés à l’offensive. Ils demandent le gel des travaux sur le PADDUC, et l’abandon des discussions autour d’alternatives à l’économie de résidence,  qu’ils continuent à soutenir. Vu l’état social de la Corse, ce n’est pas raisonnable.
Cette offensive rappelle à chacun d’entre nous, qu’il existe des projets  différents pour la Corse. La LDH regrette d’autant plus l’absence de confrontation entre ces différentes visions pendant la campagne des municipales. Les communes et les intercommunalités, les femmes et les hommes qui y vivent, sont pourtant directement concernés.
La LDH soutient le dialogue engagé avec le gouvernement. Toutefois, elle s’interroge sur la méthode retenue : des modifications réglementaires ; puis un projet de loi ; enfin l’approche constitutionnelle. Elle rappelle que le processus de Matignon, prévu en deux temps, en 2000 puis en 2004, n’a pu être mené à son terme, une révision de la Constitution, à cause de la défaite de la gauche aux élections présidentielles de 2002 *.
La LDH se félicite de la reprise des travaux du PADDUC. Elle soutient la majorité de l’Assemblée de Corse qui veut définir un autre développement pour la Corse, en s’appuyant sur une large délibération, en insistant sur la question sociale, et qui, sans nier le marché, refuse le tout marché, la dérégulation et la dé-sanctuarisation de la Corse. 

*« Certaines des mesures prévues dans le document (création d'une collectivité unique, délégation par le législateur  une deuxième étape à l'expiration du mandat de l'Assemblée de Corse en 2004 et exigeraient une révision préalable de la Constitution. » ( Assemblée nationale, projet de loi n° 2931, exposé des motifs)