« La laïcité : pour que vivent nos libertés » -
Intervention de Elsa Renaut présidente de la section au couvent de Vico à l'invitation de l'association des amis du couvent le 12/08
Bonsoir, merci à votre association pour cette invitation. Les rencontres que vous organisez chaque été s'inscrivent dans une tradition d'échanges dans note île qui contribuent à faire vivre la société civile corse. Je suis heureuse d'y participer et de pouvoir intervenir sur un thème qui a engagé fortement la ligue des droits de l'homme depuis sa création.
Il nous faut dès maintenant rappeler
que la LDH, association née en 1898 à l’occasion de l’affaire Dreyfus, a
inscrit dans l’article 1 de ses statuts qu’elle « concourt au
fonctionnement de la démocratie et agit en faveur de la laïcité ». Après son
engagement aux côtés de Dreyfus, victime de l’antisémitisme et de la raison
d’Etat, la laïcité a été l’un de ses premiers combats.
Et nous rappellerons comment elle fut
actrice historique de la loi 1905.
Le choix de ce sujet c’est aussi une
inquiétude partagée concernant la laïcité instrumentalisée et malmenée. Or,
malmener la laïcité, c’est malmener et fragiliser la démocratie.
Comment passe-t-on de la loi de 1905
de séparation des églises et de l’état, loi de liberté, à la loi de 2021 pour
conforter les principes républicains, loi fondée sur la répression et la
stigmatisation ?
Comment passe-t-on d’une période où la
République se construit sur des principes et des lois de liberté (1880 – 1905)
à notre période où ces lois et principes sont remis en cause depuis plusieurs
années portant atteinte à nos libertés et notre démocratie ?
L’exposé s’articule en trois temps :
I – La construction des fondements
de la république libérale et la loi de 1905
Dire l’esprit de
la loi 1905 qui institue notre laïcité en revenant sur la période de
construction des fondamentaux de la république démocratique et libérale qui a
permis cette loi
II – Des atteintes portées au
principe de laïcité depuis trente ans examiner
Dire notre
inquiétude face aux atteintes portées au principe de laïcité depuis une
trentaine d’années avec ses conséquences sur notre vie commune.
III – Pour un avenir laïque
Réaffirmer le
lien entre laïcité et droits de l’Homme, la laïcité comme un bien commun
universel, et la nécessité de faire vivre l’égalité des citoyens quelles que
soient leurs convictions croyances origines.
I - La
construction des fondements de la république libérale et la loi de 1905
La république et
les lois laïques qui
demeurent des repères fondamentaux
Le passage d’une monarchie absolue de
droit divin à une république laïque s’est effectué sur plus d’un siècle,
chaotique. Cela peut paraître long ou court vu l’ampleur de la transformation
de la société et de son régime politique.
La révolution française, qui s’inscrit
dans le mouvement des révolutions issues des Lumières a été la première grande
étape vers la laïcité en France. Elle a affirmé l’égalité de tous les citoyens
quelles que soient leur croyance religieuse ou leur incroyance, proclamé la
liberté de tous les cultes et institué l’état civil tenu par les communes. Elle
a initié un processus qui a abouti à la loi de 1905.
L’article 10 de la DDHC de 1789, dispose
que nul ne peut être inquiété pour ses opinions même religieuses pourvu
que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi.
C’est à partir de 1879, lorsque la
république l’emporte définitivement dans les urnes, que les républicains promulguent
des lois qui donnent socle à la république.
Ils mènent le combat pour la laïcité
et l’émancipation de la société politique en dotant la république d’un ordre
juridique. Ce combat a lieu dans un contexte d’opposition entre républicains et monarchistes, ceux-ci soutenus par
l’Eglise.
La République comme organisation
collective fondée à partir des libertés accordées à chaque individu suppose des
citoyens éclairés libres de s’auto organiser, de choisir leurs convictions.
Pour
former des citoyens capables de prendre en main leur destin, la première œuvre
des républicains est de rendre l’instruction obligatoire et de créer l’école
publique, gratuite et laïque. Jules Ferry bien sûr, mais aussi Ferdinand
Buisson, cofondateur de la LDH dont il fut plus tard président en ont été les principaux
acteurs avec d’autres, Jean Macé, fondateur de la ligue de l’enseignement.
Ce sont les lois de 1881 – 82
relatives à l’enseignement primaire obligatoire gratuit et laïque.
Auparavant en
1880, il y avait eu la loi dite « Camille Sée » sur l’enseignement
secondaire des jeunes filles.
Ce sont
ensuite plusieurs lois de liberté qui sont votées participant à la fondation de
la république libérale et à la mise en œuvre de la DDHC.
La loi de 1881 sur la liberté de la
presse
La loi de 1884 relative à la création de syndicats professionnels, dite loi
Waldeck-Rousseau abroge la célèbre loi le Chapelier du 14 juin 1791, qui
interdisait toutes les associations professionnelles
La loi de1884 relative à l’organisation municipale concerne un échelon
démocratique essentiel et les libertés locales avec l’élection des maires
La loi « Naquet »
du 27 juillet 1884 qui rétablit le divorce
La
loi de 1901 sur la liberté d’association –
Dans les pays
démocratiques, la science de l’association est la science mère ; le progrès de
toutes les autres dépend des progrès de celle-là. Alexis de Tocqueville, De la
Démocratie en Amérique.
Article 1 qui laisse une grande
liberté aux individus / liberté de conscience
L’association est la convention par laquelle deux ou
plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs
connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices
[…]
L’article 2 confirme le caractère
libéral de la loi, laissant les individus libres de toute intervention de la
puissance publique :
Les associations de personnes pourront se former
librement sans autorisation, ni déclaration préalable […]
Possibilité d’une construction d’une société civile autonome, de
contre-pouvoirs fondamentaux en démocratie.
(Sont aussi adoptés la laïcisation des
hôpitaux, la sécularisation des cimetières, la liberté des funérailles, le
retrait des emblèmes religieux dans les tribunaux.)
La loi 1905 de
séparation des Eglises et de l’Etat
En 1903, Francis de Pressensé, un membre
fondateur de la LDH et son président de 1903 à 1914, prend l’initiative de rédiger
une proposition de loi de séparation pour enclencher le processus législatif.
Son projet est cosigné par 56 députés dont Jaurès, Briand et Buisson.
C’est notamment en réaction à E.
Combes, président du conseil, anticlérical mais qui ne veut pas de la
séparation (souhaite garder le Concordat comme arme de contrôle),
C’est dans le contexte de l’affaire
Dreyfus, contre lequel l’église s’est engagée en solidarité avec l’armée. L’affaire
Dreyfus, avec ce qu’elle met en perspective est déterminante dans cette initiative
de de Pressensé. Elle représente l’apparition d’un autre antisémitisme où les
juifs sont les ennemis de l’intérieur, les traîtres. Elle signifie la naissance
de l’extrême droite antisémite. Elle met au jour le danger et l’arbitraire de
la raison d’Etat, d’un régime qui recourt aux tribunaux militaires et à leur
justice d’exception. De Pressensé considère que l’attitude du parti catholique,
nationaliste, antisémite, antirépublicain soutenu par la hiérarchie de l’Eglise
catholique doit être neutralisée.
Le combat pour la Séparation faisait
aussi partie de ses héritages. Son père Edmond de De Pressensé concevait que les
Eglises et les chrétiens étaient entravés par leur union avec la société
politique. Se réclamait de la formule de Cavour « une église libre dans un
état libre ».
Ce projet de séparation et de régime
des cultes est fondé sur le principe de la liberté de conscience, la création
d’un statut pour les sociétés religieuses et d’une police des cultes.
Il suscite le débat et d’autres
projets. La Chambre à la demande de de Pressensé va par conséquent élire une
commission plurielle de 33 députés pour travailler à un régime des cultes sur
la base de la séparation.
On peut souligner le processus de
travail collectif qui a présidé à l’élaboration de cette loi.
Ce travail a duré deux ans et la loi est
approuvée en juillet 1905 par 341 voix contre 233, adoptée au sénat sans
amendement en décembre et promulguée le 9.
La loi met donc fin au régime
concordataire, accord entre le premier consul Bonaparte et Pie VII, qui
reconnaissait la religion catholique comme « religion de la grande
majorité des français ».
Le projet de De Pressensé a fourni la
matrice et l’esprit de la loi conçue pour permettre la libération,
l’émancipation à la fois de l’église et de l’état.
On retrouve dans la loi les 4 parties
de son projet :
1 les principes, 2 les questions
matérielles (propriétés, édifices), 3 la définition des sociétés civiles pour
l’exercice des cultes nommées associations cultuelles 4 la police des cultes
Citation des 2
premiers articles qui énonce les principes
Article 1
La république assure la liberté de
conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules
restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public.
Article 2
La République ne reconnaît ne salarie
ni ne subventionne aucun culte.
Sauf dépenses relatives à des services
d’aumônerie destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les
établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et
prisons.
Sont affirmées :
-
1- La liberté de conscience et d’expression de
ses convictions, c’est à dire le droit de manifester, d’exprimer ses croyances,
ses convictions, sans pression et la liberté de culte dans le respect de la loi
démocratique.
Au fondement de
la laïcité se trouvent la liberté de conscience et la liberté de culte.
Est clairement énoncé le fait que la
laïcité ne s’oppose pas aux religions mais défend la liberté d’en avoir une ou
de ne pas en avoir.
Loi de liberté, elle se fonde sur le
principe selon lequel la liberté est la règle, la restriction de police,
l’exception.
-
2- La séparation du politique et du religieux
pour garantir l’intérêt général, pour assurer l’égalité des citoyens devant un
état neutre.
La neutralité de
l’Etat laïque et de ses services publics est la condition de l’égalité des
citoyens
La neutralité ne concerne pas les
usagers. L’Etat est neutre mais pas la société ni les citoyens.
Neutralité pose
le refus des discriminations
-
Enfin, liberté
suppose absence de pression, citons l’article 31 « sont punis ceux qui
auront déterminé un individu à exercer ou à cesser de faire partie d’une
association cultuelle…(protège du prosélytisme menaçant ou violent)
La Ldh est attachée à cette loi de
liberté non seulement en raison de cette neutralité mais aussi parce que sa
promulgation achève la mise en place d’une société civile entreprise à partir
des années 1880.
Cette société civile entièrement
indépendante de l’Etat est dotée d’un espace public propre distinct de l’espace
institutionnel de l’Etat, et dans lequel toutes les expressions, y compris
religieuses sont légitimes.
« Le processus de laïcisation a
permis l’autonomie progressive du sujet, de l’école et de l’Etat par rapport à
la, puis aux religions. La laïcité a été ensuite ce dispositif qui permet de
faire coexister une totale liberté de conscience pour les sujets, une entière
liberté d’expression dans l’espace civil pour la multiplicité des groupes
sociaux, dont les groupes religieux avec l’unité de l’Etat garantie au bénéfice
de tous, par la loi et le droit. »
Elle est un état social qui nous
permet de vivre ensemble, au-delà de nos différences d’origine et d’options
spirituelles.
Reprenant des propos d’Etienne Balibar :
Historiquement l’idée de laïcité se partage entre deux conceptions :
étatiste et autoritaire / libérale voire libertaire. (Hobbes/Locke)
L’une pose le primat normatif de l’ordre
public sur les activités et opinions privées
L’autre pose l’autonomie de la société
civile, dont relèvent les libertés de conscience et d’expression, comme
l’organisation de la société dont l’état est le serviteur et le garant.
La
loi de 1905 relève évidemment de la seconde. Elle a évité les projets
anticléricaux de laïcisation de la société en garantissant des libertés
individuelles et collectives. C’est par la promotion des libertés que la
laïcité s’est imposée non pas par la répression.
Pour
cela, il semble important de connaître l’héritage de la laïcité issue de la loi
de 1905. Quand on invoque la laïcité aujourd’hui, impossible de faire comme si
Jaurès, De Pressensé, Briand n’avaient pas existé et de faire comme si
c’étaient ceux qui souhaitaient interdire les processions, réglementer le port
de la soutane et la taille des cornettes qui l’avaient emporté.
II- Les atteintes
portées au principe de laïcité depuis trente ans
Balibar
- Les détournements de la laïcité auxquels on assiste sont troublants parce que
tendent à inverser la fonction politique d’un principe qui a eu un rôle
essentiel dans notre histoire.
C’est
de ce principe dont on peut se réclamer lorsque la laïcité de l’Etat est
menacée dans son existence comme sous Vichy, (ce qui a entraîné son inscription
dans la Constitution de 1946)
Pour
introduire retour sur le mot laïcité (Philippe Blanchet professeur de
sociolinguistique membre de la LDH)
Apparaît avec les lois Ferry sur
l’école publique
Et la loi de 1905
Vient de laïc au XVe : le
fait de ne pas être membre du clergé puis par extension fin XIXe, le fait de ne
pas relever d’une religion pour une personne, chose, abstraction
De la période 1880 – 1910 que date les
deux orthographes - laïc : qui n’est pas membre du clergé et - laïque : qui ne relève pas d’une
religion.
In le Trésor de la langue
française :
- Principe de séparation dans l’Etat
de la société civile et de la société religieuse
- Caractère des institutions publiques
ou privées qui sont indépendantes du clergé et des églises
- Impartialité et neutralité de l’Etat
à l’égard des églises et de toute confession religieuse
Depuis le début
des années 2000, a été observé une forte augmentation des usages de ce mot
Mot de l’année en 2015 par le lexicographe
Alain Rey avec comme point de départ les attentats de 2001.
Son emploi est corrélé en France :
au débat sur le port du voile au début
des années 2000 qui aboutit à la loi de 2004 qui transforme le principe de
laïcité de 1905,
au débat sur l’identité nationale
française sous Sarkozy 2009
à l’interdiction du port public du
voile intégral,
aux polémiques sur le burkini
aux attentats contre Charlie hebdo, à ceux
de 2016,
à l’assassinat du professeur Samuel
Paty
La médiatisation et usages du mot et
du thème apparaissent en réaction à des événements liés de façons diverses avec
la religion musulmane.
Les usages et occurrences du thème ne
montrent pas que cette question a été présente dans les discours publics tout au
long du XXe.
Le mot n’apparaît pas lié à une
réflexion qui aurait été menée au long du XXe mais comme en réaction
d’opposition à l’islam.
On ne constate pas d’usages
significatifs issus d’une réflexion politique de rapports raisonnés entre les institutions,
la société civile, les religions.
C’est en effet autour
de la polémique sur le foulard porté par des collégiennes dans un collège de
Creil que la question de la laïcité est revenue ou a fait irruption dans les
débats publics en 1989.
A ce moment, le conseil d’Etat rend
son avis pour mettre fin la polémique : le port de signes religieux par
les élèves est autorisé sous certaines conditions :
La
liberté ainsi reconnue aux élèves comporte pour eux le droit d’exprimer et de
manifester leurs
croyances religieuses à l’intérieur des
établissements scolaires, dans le respect du pluralisme et de la
liberté d’autrui, et sans qu’il soit porté atteinte
aux activités d’enseignement, au contenu des programmes
et à l’obligation d’assiduité.
En
1996, le Conseil d’Etat annule des exclusions d’établissements scolaires pour
le port du foulard qui « ne sauraient être regardé comme un signe dont le
port constituerait un acte de pression ou de prosélytisme »
Après les attentats djihadistes de
2001 qui suscitent effroi, émotion et inquiétudes légitimes, les peurs se
cristallisent de façon irrationnelle sur tout ce qui renvoie à l’islam.
Le
gouvernement par la peur et la logique de l’ennemi intérieur se développent :
l’ennemi désigné est le musulman.
Lorsque
Sarkozy, ministre de l’intérieur annonce vouloir une loi sur l'obligation d'avoir la tête nue lors de
la prise de photos d'identité (devant le congrès de l'Union des organisations
islamiques de France) la question de légiférer sur le port du foulard notamment
à l’école revient en force.
Chirac met en place une commission de
réflexion sur l'application du principe de laïcité dans la République qui
débouchera sur la loi de 2004.
Cette loi de 2004 introduit un changement radical du principe
de laïcité.
Rappel des termes, elle « interdit
le port de signes ou de tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement
une appartenance religieuse »
En limitant la liberté d’expression de
l’enfant pour le protéger, la loi implique pour la 1ère fois que la
neutralité de l’Etat et de ses agents s’applique à des usagers du service
public.
Elle a ouvert la porte à d’autres
demandes de neutralisation de l’espace public, avec la demande d’interdire le
port du voile pour les mères accompagnatrices de sorties scolaires, pour les étudiantes
dans l’enseignement supérieur.
Par ailleurs, cette loi impose
l’alternative entre l’interdiction de porter le foulard en classe et
l’exclusion de l’école ; ce qui représente une double violence humaine, sociale,
institutionnelle.
Selon l’ONU, l’application de cette
loi entraîne la violation du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques :
En 2008, un lycéen sikh du nom de
Bikramijt Singh, exclu de son établissement scolaire en 2004 pour avoir refusé
d’ôter son turban sikh, saisit le Comité des Droits de l’Homme de l’ONU –
chargé de veiller au respect, par ses signataires, du Pacte international
relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). Après avoir mené sa propre
enquête, le Comité des droits de l’Homme estime, dans un avis daté du 1er
novembre 2012, que l’État français « n’a pas apporté la preuve
irréfragable que le lycéen sanctionné aurait porté atteinte », en n’ôtant
pas son keski, « aux droits et libertés des autres élèves, ou au bon
fonctionnement de son établissement ». Le Comité estime également que son
renvoi définitif de l’école publique « a constitué une punition
disproportionnée, qui a eu de graves effets sur l’éducation à laquelle il
aurait dû avoir droit en France, comme toute personne de son âge ». L’ONU
conclut que le renvoi de Bikramijt Singh de son lycée constitue « une
violation » du PIDCP, et que la France, signataire de ce Pacte, est, à ce
titre, dans la double obligation de réparer l’injustice faite au lycéen
(« y compris par une compensation appropriée »), et « d’empêcher
que de semblables violations ne se reproduisent dans le futur ».
Foulard autorisé dans établissements
scolaires publics en Allemagne, au Danemark, Pays-Bas, Grande-Bretagne, Grèce,
Suisse.
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En 2008, survient
l’affaire de la crèche Baby Loup, le
licenciement d’une employée d’une crèche privée au motif du port du foulard,
Au nom de la laïcité.
Cette affaire manifeste l’extension des
obligations de neutralité aux personnes privées et l’aggravation des atteintes
portées à la laïcité. On oppose laïcité et droits de l’Homme, on étend la
neutralité de l’Etat à la neutralisation des citoyens.
On a parlé d’usurpation de l’héritage
de 1905. (« nouvelle laïcité »)
Et la cible ce sont toujours les
personnes de confession musulmane et en particulier les femmes.
! En 2018, le comité des droits de
l’Homme de l’ONU a estimé que le licenciement ne reposait pas sur un critère
raisonnable et a demandé que la France soit tenue d’indemniser la plaignante.
Loi de 2010 sur l’interdiction de dissimuler son visage
dans l’espace public
En juin 2009 le président de la
République, a déclaré devant le Congrès réuni à Versailles, que « la burqa
n’est pas la bienvenue sur le territoire de la République française. »
assurant que le voile intégral n'était "pas un problème religieux", mais "de
liberté et de dignité de la femme".
Création d’une mission d’information
parlementaire sur la pratique du port du voile intégral en juin 2009.
Comme en 2004, (comme en 2021, nous le
verrons) l’objet de la loi a été élargi pour éviter le grief de discrimination
ou de stigmatisation des personnes de confession musulmane.
La loi dispose notamment que « nul ne
peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son
visage » (article 1er).
Les circulaires d’application
indiquant « atteinte aux exigences minimales de vie en société », « incompatible
avec le principe de dignité humaine ».
Dénote une évolution de la notion
d’ordre public, on glisse de l’ordre public matériel à l’ordre public moral.
Le Conseil d’Etat avait pourtant
indiqué que l’interdiction absolue du voile intégral sans pouvoir être justifié
par des nécessités d’ordre public porterait atteinte aux droits fondamentaux.
Pour sa part, la Cour Européenne des
DH, qui ne s’oppose pas à la loi dans un arrêt de 2014 a précisé : La
cour admet qu’il puisse paraître démesuré, au regard du faible nombre de femmes
concernées, d’avoir fait le choix d’une loi d’interdiction générale. Elle
constate en outre que cette interdiction a un fort impact négatif sur la
situation des femmes qui ont fait le choix de porter le voile intégral pour des
raisons tenant à leurs convictions et que de nombreux acteurs nationaux et internationaux
de la protection des droits fondamentaux3 considèrent qu’une interdiction
générale est disproportionnée. Elle souligne par ailleurs qu’un État qui
s’engage dans un tel processus législatif prend le risque de contribuer à
consolider des stéréotypes affectant certaines catégories de personnes et d’encourager
l’expression de l’intolérance alors qu’il se doit au contraire de promouvoir la
tolérance.
En 2016 – se
multiplient les arrêtés anti-burkinis /
en réaction aux attentats, sous le coup de la peur
Ils sont annulés par le conseil d’état
pour atteinte grave à la liberté d’aller et venir, liberté de conscience et liberté
personnelle.
Etienne
Balibar « En démocratie, les droits des
femmes relèvent de leurs décisions, et non d’une interprétation plaquée sur
leur comportement pour les forcer à être libres. La laïcité
institutionnelle est une obligation de neutralité de l’Etat envers les citoyens
et non pas une obligation idéologique des citoyens envers l’état. »
Analyse et alerte de la LDH dès
2003 :
Au travers du foulard, que son port
procède d'une démarche revendiquée ou d'une soumission à un rôle social, c'est
l'image et la place des musulmans en France qui sont en cause.
Bien des peurs se focalisent sur les
musulmans : terrorisme, insécurité, immigration, banlieues transformées en zone
de non droit, intégrisme religieux, etc. Leur situation dans la société porte,
en fait, la trace d'une incertitude permanente. S'ils sont étrangers, ils sont
soumis à l'instabilité et à l'ostracisme de la loi, (le dernier projet du
gouvernement s'y employant plus que jamais). S'ils sont français, cela ne les
empêche nullement de subir les discriminations quotidiennes qui délitent tout
autant le lien social.
A l'inverse de tous les principes de
la République, les musulmans sont individuellement assignés à résidence. Ils
n'auraient pas d'autres droits, quelle que soit leur manière de vivre l'Islam,
et elle n'est certes pas uniforme, que de se conformer à des canons d'un mode
de vie "français" aussi indéfinis qu'arbitraires. Ils sont ainsi
renvoyés à une existence communautaire qu'ils vivent comme le lieu d'une
existence sociale et culturelle qui leur est déniée par ailleurs. L'Islam est
alors utilisé comme un mode de reconnaissance, le moyen d'exprimer une
visibilité sociale qu’on leur refuse dans le même temps.
Ici se trouve le terreau d'une révolte que
certains manifestent en se fourvoyant dans l'intégrisme.
Il est plus que nécessaire d’assurer
l'intégration d'une population marquée au sceau de l'exclusion.
Cela passe par la reconnaissance d'une
diversité culturelle qui doit s'exprimer dans le cadre de l'égalité de
traitement que la République doit assurer à tous. L'Islam doit bénéficier de la
liberté du culte et doit supporter les règles qu'impose une société laïque,
pluraliste et profondément sécularisée.
Elle passe, enfin, par un véritable
projet politique qui prenne en compte l'exclusion dont sont victimes des
millions de personnes, françaises ou non, musulmanes ou non, et qui mette en
œuvre une réelle politique d’égalité entre les hommes et les femmes.
C'est à ce prix-là que les femmes
cesseront d'être victimes de violences réelles ou symboliques, c'est à ce
prix-là que l'on évitera de contraindre les esprits ou, pire encore, de
transformer l'Islam en un instrument de révolte.
Il n'est pas de réponse laïque, ni de
lutte efficace contre le risque de communautarisme, hors du combat pour
l'égalité et la citoyenneté sociale.
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Loi 2021 pour
conforter les principes républicains dont l’exposé des motifs vise « un
entrisme communautariste pour l’essentiel d’inspiration islamiste »
Jean BAUBEROT- fondateur de la
sociologie de la laïcité : « Dans ses discours de Mulhouse et des
Mureaux, Emmanuel Macron cherchait un équilibre entre le séparatisme produit
par la république et le radicalisme religieux. Il n’en reste rien dans le
projet de loi où les mesures en faveur de la mixité sociale, prévues à
l’origine, ont disparu.
Le message envoyé par le gouvernement
est que pour lutter contre l’islam radical, il faut renforcer les contrôles
administratifs et la surveillance des cultes. La plupart des mesures remettent
en cause des libertés fondamentales en démocratie et risquent d’être
contre-productives. »
Même Emile Combes n’envisageait pas à
l’époque de confier à l’autorité administrative la décision de fermeture d’une
association pour une suspicion de délit.
Préconise de s’inspirer de Jaurès et
Briand : isoler les extrémistes, avec une loi inclusive qui a permis à la
majorité des catholiques de pratiquer leur culte à leur manière. (Accusés de
socialo-papalins comme islamo-gauchistes les défenseurs de la loi 1905.)
Les mesures de la
loi touchent à la liberté de conscience et à la liberté de culte
-
Associations et
syndicats tenus de signer un contrat d’engagement républicain pour solliciter
une subvention.
Ce qui incite les collectivités
locales à repérer des activités qui ne seraient pas compatibles avec ce contrat
pour retirer ou refuser une aide.
-
Enseignement en
famille exceptionnel peut être autorisé pour des motifs matériels ou médicaux
sans motif philosophique, religieux politique
Liberté de choisir l’instruction de
ses enfants (qui a valeur constitutionnelle) entravée
-
La possibilité de
dissolution des associations (liberté fondamentale à valeur constitutionnelle) est
étendue
Normalement devrait être réservé à
l’autorité judiciaire garante des libertés
Loi étend les motifs de dissolution
administrative
Impute à l’association les faits
commis par un membre, ce qui peut entraîner la dissolution
-
Pour être reconnu
association cultuelle, il faut déposer une déclaration en préfecture qui peut
être refusée faisant perdre les avantages liés au statut et donc moyens
d’exister
Il faut se
déclarer tous les 5 ans ;
C’est la liberté de culte qui est
touchée
-
Répression accrue
en matière de police des cultes avec accroissement des peines et interdiction
de diriger une association cultuelle étendue à plusieurs infractions
En juin 2022, la ligue de
l’enseignement (dont on a vu le rôle historique) s’est vu suspendre sa
subvention au motif de propos contraires aux valeurs de la laïcité et de la
république tenus par des jeunes participant à un concours d’éloquence pour la
laïcité !!!
Remise en cause des fondements de la
république libérale tels qu’on les a énoncés. Il s’agit d’une loi qui s’attaquent
aux principes fondamentaux.
>> Avis Défenseur des Droits en
2021
« Ainsi que l’a souligné le Conseil d’Etat dans
son avis, ce projet de loi (devenu loi) concerne pratiquement « tous les
droits et libertés publiques constitutionnellement et
conventionnellement garantis, et les plus éminents d’entre eux : la liberté d’association, La liberté de
conscience et de culte, les libertés de réunion, d’expression, d’opinion, de communication, la liberté de la
presse, la libre administration des collectivités
territoriales, la liberté d’enseignement, la liberté du mariage, la liberté
d’entreprendre, la liberté contractuelle. »
Ce projet de loi modifie ainsi quatre des grandes
lois relatives aux libertés (et comme nous l’avons rappelé fondatrices de la
République libérale démocratique
) :
- Celle de 1881 sur la liberté de la presse,
- Celle de 1882 sur l’instruction primaire
obligatoire,
- Celle de 1905 sur la séparation des Eglises
et de l’Etat ;
- Celle de 1907 sur l’exercice public des
cultes
Or
ces libertés sont précisément au
cœur des « principes républicains », qu’il s’agit –
d’après l’objet du projet de loi – de conforter. Elles
n’en sont ni un accessoire, ni un regrettable
désagrément. La Défenseure des droits tient donc à attirer l’attention sur le risque que certaines de ses
dispositions, en affaiblissant précisément ces libertés, aient pour effet d’affaiblir les principes républicains
eux-mêmes, plutôt que de les conforter et de les promouvoir. »
Pour la Ldh, La lutte contre
l’extrémisme ne peut se faire au prix de la remise en cause de ce qui fonde historiquement
la république libérale, les libertés fondamentales inscrites dans les
déclarations, ni au prix du renforcement du sentiment d’exclusion d’une partie
de la population. (Toutes les enquêtes de la Dilcrah montrent que les
musulmans sont les premiers frappés par diverses formes de discriminations.)
En juillet 2022 Au regard des
premiers résultats alarmants de la deuxième édition de l’enquête
« Trajectoires et Origines » réalisée par l'Ined et l'Insee, la
Défenseure des droits renouvelle ses inquiétudes face à l’ampleur des
discriminations et la faiblesse persistante des recours. » Elle demande
« aux pouvoirs publics d’agir pour prévenir et sanctionner les
discriminations qui minent notre cohésion sociale. »
De cette loi 2021, le Conseil
Constitutionnel a émis des réserves mais n’a censuré qu’un seul article en
raison de son imprécision :
La possibilité de refuser un titre de
séjour « s’il est établi que la personne a manifesté un rejet des
principes de la république ».
Parmi d’autres accusations, cet argument
est repris par le ministre de l’intérieur pour refuser le titre de séjour et
demander l’expulsion de l’imam Hassan Iquioussen, né et établi en France.
Nous le savons, cette expulsion a été suspendue
par le tribunal administratif ; cette accusation en particulier reposait
plus sur des allégations que sur des éléments probants. L’avocate pour sa
défense « Je ne vous demande pas de soutenir les idées de M. Iquioussen,
mais de soutenir les libertés fondamentales ».
Inquiétant parce que Gérald Darmanin,
qui a fait appel, dit que si le Conseil d’État lui donne tort, il proposera de
modifier la loi - le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit
d'asile - pour la durcir encore.
Or l’expulsion de personnes étrangères
est déjà prévue dans le code « en cas de comportements de nature à porter
atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à
caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et
délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne
déterminée ou un groupe de personnes ».
Entre les lois antiterroristes (25
depuis 1985), le durcissement toujours renforcé du code des étrangers, la loi
de 2021, un régime de répression et de contrôle social toujours plus inquiétant
qui se met en place.
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Ce Projet de loi 2021 avait été annoncé
peu avant l’assassinat de S.Paty
Rendant hommage à Samuel Paty, la Ldh avait
rappelé :
Les adversaires ce sont celles et
ceux qui au nom d’un islamisme politique intolérant sèment la haine, tuent pour
répandre la terreur. Cela implique des Etats, des réseaux d’influence, des
courants religieux, des fanatiques prêts à mourir pour tuer.
Pas des millions de musulmans qui
vivent travaillent prient et envoient leurs enfants à l’école de la République,
ni les mères volontaires pour les sorties scolaires au risque d’insultes, ni
les associations qui saisissent la justice pour demander l’application de la
loi pour combattre le racisme, ( cf dissolution des associations dont CCIF ) ils
ne se trouvent pas dans un rayon Hallal.
Elle
avait réaffirmé son refus des amalgames haineux entre assassins et une
religion, d’attribuer au religieux ce qui relève d’un accaparement sectaire de
la rupture sociale.
Et
appelé à défendre les valeurs que le fanatisme combat.
Surinvestir
le religieux divise la société - Pourquoi ne pas prendre au sérieux les
musulmans ? – le recteur de la Mosquée, Latifa Ib Zaeten, de simples
citoyens de confession musulmane victimes ou non des attentats de Nice ou du
bataclan – « Ces barbares n’ont ni foi ni loi ni religion ».
Averroès,
philosophe arabe et musulman andalou au XIIe siècle prônait l’égalité entre les
religions et les présentait comme différentes manières d’atteindre dieu
Benjamin Stora s’interroge :
d’une laïcité sans l’Islam à une laïcité focalisée sur l’Islam ?
« En 1905, l’Algérie était française
et considérée comme des départements Français. Pas simple colonie comme
Tunisie, par exemple.
Or le débat sur la séparation du
religieux et du politique n’a absolument pas concerné l’Algérie et ses
habitants de l’époque.
En 1931, l’Association des oulémas,
par exemple a la revendication de se séparer de l’Etat.
Lorsqu’il s’agissait d’affirmer les
principes laïques avec l’Eglise catholique, le culte protestant et israélite,
l’islam ne faisait pas partie du débat. On n’en tenait pas compte.
Aujourd’hui, quand on parle de
laïcité, on ne parle que de l’islam.
C’est une vraie question. »
Même si « dans les pays arabo-musulmans,
la question de la séparation et de la sécularisation n’est pas réglée, »
ne pas importer cette question en brouillant les repères. « Ces deux
aspects : obsession de l’islam et non séparation entre religion et états
dans les pays d’islam renforcent la difficulté de la stigmatisation de l’Islam
que nous connaissons. »
Entretenir l’Islam comme religion de
l’étranger, du « colonisé », détourner la laïcité au service de
l’assimilation (à l’opposé de l’intégration à la vie sociale) nourrit
l’idéologie fondamentaliste islamique qui dénonce l’emprise de la culture occidentale
sur la communauté musulmane en Europe.
La LDH à contre-courant d’un débat
public animé par une dérive raciste qui tend à réputer l’islam inassimilable et
à faire de la laïcité un outil de discrimination.
Reconnaître le droit de croire ou de
ne pas croire suppose qu’on refuse d’établir une hiérarchie entre les religions
dans leur capacité à être compatible avec la République.
Islam, en tant qu’élément de
visibilité sociale ne peut être utilisé comme une raison, un alibi pour rejeter
les populations « de condition musulmane ».
On est face à un déguisement
antireligieux du racisme entretenu par les extrêmes droites qui ne peut
que susciter des réactions de violence et réactions de replis identitaires et
communautaires.
Application à tous de la laïcité en refusant
idéologie de la hiérarchie et de l’inégalité peut faire de la République une
démocratie fidèle à ses principes de liberté égalité fraternité.
« La laïcité, c’est
l’indispensable garantie, sans discrimination entre les cultes, du respect de
la liberté et de la dignité égales des citoyens, quelles que soient leurs
origines, convictions, croyances ou incroyances. »
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Pour un avenir laïque
Le retour sur l’histoire de de la laïcité montre que c’est par la liberté
et non par la contrainte que la laïcité est devenue un bien commun mais aussi que
les combats contre toutes les formes de domination et inégalités ne sont jamais
achevés.
Pour faire vivre ce bien commun, aujourd’hui comme hier les combats
à mener se situent sur le plan politique pour la défense des libertés et non
sur le plan religieux pour mettre en cause des croyances et des pratiques.
Le principe de laïcité (organisationnel, procédural) garantit les
libertés ; ne définit pas d’interdit.
Est ce qui permet de ne pas nous ressembler et ce qui doit nous
rassembler.
Même si la construction d’un monde commun ne repose pas que sur la
laïcité mais ensemble des droits fondamentaux indivisibles.
Pour défendre la
laïcité sur le terrain des droits de l’Homme, ne pas oublier les textes qui
protègent les droits, références des Etats de droit
Un bien commun universel, un principe
énoncé dans les textes internationaux qui affirment la liberté de
conscience, de pensée et de religion ainsi que la liberté de manifester sa
religion ou sa conviction tant individuellement que collectivement en public,
en privé, par le culte, l’enseignement et l’accomplissement des rites.
Dans la DUDH, et 3 textes
juridiquement contraignants : Pacte international des droits civils et
politiques, Convention Européenne de sauvegarde des DH et des LF, Charte européennes
des droits fondamentaux.
Rappel : Un principe à valeur
constitutionnel
Article 1er de la
constitution : La France est une République, indivisible, laïque,
démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les
citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte
toutes les croyances.
Extrait du texte
de Jean-Pierre Dubois - Pour un avenir laïque
« La relativisation des
frontières, les échanges de plus en plus intenses et les migrations planétaires
augmentent les contacts entre cultures et civilisations, avec des conséquences
ambivalentes : enrichissement mutuel incontestable – l’anthropodiversité, comme
la bio-diversité, est aussi précieuse que souvent menacée – mais aussi peurs,
fantasmes et incompréhensions dont des politiciens sans scrupules font leurs
choux gras.
Et l’on entend ici et là d’étranges «
laïques » opposer un « Dieu d’amour », auxquels nos climats sont habitués
depuis Clovis, à un « Dieu de haine » d’où ne pourraient sortir que terrorisme
et barbarie… Au point qu’il faudrait, selon certains, entrer en campagne contre
l’islamisation de la France.
Il est donc urgent, face à la bêtise
haineuse, de rappeler que liberté, égalité et laïcité sont indissociables, et
que toute instrumentalisation culturaliste ou xénophobe défigure cette laïcité
qui n’est pas une référence chauvine mais une valeur universelle.
Les voies qu’empruntent nations et
civilisations sont légitimement diverses et chaque peuple est libre de son
destin… Sauf le respect, ni plus ni moins, des droits de l’Homme qui implique,
partout sur cette planète, l’exigence d’une égale liberté de conscience,
d’expression et de « conviction » pour tous les êtres humains.
Dans le monde qui vient, dissocier
égalité et universalité des droits a moins de sens que jamais. La laïcité,
référence historique dont nous sommes fiers et engagement que nous assumons
chaque jour, est aussi une valeur pour demain sans laquelle ni la paix, ni
l’égalité ni la démocratie ne sont durablement viables.
A condition qu’elle ne s’enferme ni
dans l’exclusion ni dans l’ethnocentrisme. C’est parce que toute l’histoire de
la LDH nous préserve de ce contresens que nous continuons à voir dans une
laïcité vivante et universalisable le chemin le plus sûr d’un avenir »