dimanche 18 mars 2018

Lettre ouverte aux élu-e-s territoriaux *

Ce lundi 19 mars, un nouveau rendez-vous entre l'Exécutif et Matignon est prévu. A cette occasion, une lettre ouverte, à l'initiative de la Ldh et signée par plusieurs personnalités de l'île, est adressée aux élus de l'Assemblée de Corse et du Conseil Exécutif de Corse. Elle rappelle la nécessité d'apporter des réponses à la situation des prisonniers politiques et de ceux qui subissent toujours les conséquences de l'antiterrorisme au travers du Fijait et d'amendes exorbitantes alors qu'ils ont purgé leur peine.
Elle propose que soit mené le débat pour une amnistie utile et nécessaire.

Lettre ouverte aux élu-e-s territoriaux *
                               
Le 28 mai 2015, l’Assemblée de Corse adoptait une délibération. Elle établissait le constat suivant : « Le FLNC a engagé un processus de démilitarisation. Il s’y est tenu. Les attentats de nature politique ont cessé. » Aujourd’hui, ce constat demeure.  Dans son texte de 2015, la représentation territoriale en appelait à « un processus global » pour « transformer cette situation en paix durable » qui incluait « la mise en œuvre du rapprochement des détenus et la question de l’amnistie, à laquelle la collectivité territoriale de Corse est favorable sur le principe, étant entendu que les modalités et le périmètre de cette amnistie seront précisées dans le cadre du débat à venir. » Qu’en est-il à ce jour du rapprochement et de l’amnistie ?
Des prisonniers politiques sont toujours en attente de leur rapprochement. Pourtant, la loi le permet, y compris pour les détenus particulièrement surveillés, les DPS, dès lors que cette mesure coercitive ne leur sera plus appliquée. Il revient donc à l’Etat d’agir conformément à la loi sans oublier toutefois que rien ne se fera sans notre vigilance.
Par ailleurs, d’ici la fin de l’année 2018, des procès de nationalistes sont prévus. Dès à présent, il est nécessaire d’anticiper sur ces jugements.
Mais d’autres obstacles à une paix durable se sont déjà ajoutés : le FIJAIT, le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes.  Ses conséquences pour les personnes qui y sont inscrites sont un contrôle policier drastique en matière de résidence ou de déplacement à l’étranger et l’inscription au fichier des personnes recherchées. La contestation de ces contraintes signifie aujourd’hui de nouvelles condamnations pour refus d’obéissance à la loi.
Autre obstacle à l’apaisement : les amendes de plusieurs milliers d’euros que doivent régler les nationalistes ayant commis des attentats, au nom des préjudices subis par des particuliers ou par l’Etat. Ces astreintes hypothèquent leur avenir social et celui de leur famille avec des risques évidents de précarisation.
Pour les personnes concernées, il n’est plus possible de contester devant un juge ces inscriptions au FIJAIT et ces amendes. Pourtant, l’anachronisme de ces décisions de justice est évident et celles-ci génèrent de nouvelles tensions.
Pour s’émanciper définitivement de la pression que l’antiterrorisme continue d’exercer sur la société corse, pour construire l’avenir, nous avons besoin d’un acte politique qui rompt avec la logique de répression puisqu’il n’y a plus de violence. Nous avons besoin d’une amnistie utile et efficace qui permette de lever les obstacles à l’apaisement en actant la non inscription au FIJAIT de nationalistes qui ont purgé leur peine et l’effacement des amendes liées aux attentats lorsque l’Etat est victime.
Comme le souligne Paul Ricœur qui consacra une part importante de son œuvre à la recherche de « la juste mémoire », « refusant le trop de mémoire ici et le trop d’oubli ailleurs », « si une forme d’oubli pourra alors être évoquée, ce ne sera pas un devoir de taire le mal, mais de le dire sur un mode apaisé, sans colère »
Mesdames et messieurs les élu-e-s, la ligue des droits de l’homme est convaincue que cette parole philosophique peut être entendue au plus haut niveau de l’Etat. Dans le prolongement de la délibération de l’Assemblée de Corse du 28 mai 2015, elle vous demande d’œuvrer en ce sens.
Ajaccio, le 18 mars 2018

Jean-Claude ACQUAVIVA, Marie-Anne ACQUAVIVA, Vincent ANDRIUZZI, Pascal ARROYO, Dominique BIANCONI, Antonin BRETEL, Frédérique CAMPANA, Gigi CASABIANCA, Jean-François CASALTA, Jean-Sébastien de CASALTA, Vincente CUCCHI, Francine DEMICHEL, Alain DI MEGLIO, Patrizia GATTACECA, Francis MARCANTEI, Christine MATTEI-PACCOU, Ibtissam MAYSSOUR-STALLA, Miloud MESGHATI, Jean-René MORACCHINI, Gérard MORTREUIL, Marie Alice ORLANDETTI, André PACCOU, Gaston PIETRI, Lydia POLI, Patrizia POLI, Elsa RENAUT, Dumé RENUCCI, Didier REY, Sampiero SANGUINETTI

*A l’initiative de la Ligue des droits de l’Homme 

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samedi 17 mars 2018

LOI ASILE-IMMIGRATION : UN PROJET DÉSÉQUILIBRÉ QUI INQUIÈTE LES ASSOCIATIONS


Communiqué commun signé par la LDH
Le gouvernement a présenté le projet de loi asile-immigration en Conseil des ministres le 21 février 2018. Certaines mesures sont positives, comme l’accès à la carte de résident des parents d’enfants bénéficiaires d’une protection internationale, ou encore l’extension à quatre ans de la carte de séjour pluriannuelle pour les bénéficiaires d’une protection subsidiaire.
Mais ce texte contient principalement des mesures qui vont dégrader la procédure d’asile et l’accompagnement social proposé par les associations, dans un contexte où l’ensemble des demandeurs d’asile ne pourra être hébergé, faute de places suffisantes :
- Le raccourcissement des délais d’instruction des demandes d’asile s’effectue principalement au détriment du demandeur et risque de fait d’exclure des milliers de personnes de la protection : réduction des délais de recours devant la CNDA, fin du caractère suspensif du recours dans certaines situations, instauration des audiences par vidéo-conférence, notification des décisions par « tout moyen ».
- Le projet de loi renforce les mesures directives et instaure un contrôle des préfectures, avec le risque de créer une confusion générale entre surveillance administrative et action sociale et de dégrader le travail des acteurs sociaux dans l’accompagnement pour l’accès aux droits (orientation directive sur l’ensemble du territoire national sans garantie d’une proposition effective d’hébergement, contrôles préfectoraux dans les structures d’hébergement, restriction de la liberté d’aller et venir).
- Au prétexte de renforcer l’efficacité des mesures d’éloignement, le projet développe à outrance les mesures de contrôle et de privation de liberté (systématisation de l’assignation à résidence, forte hausse de la durée de rétention) auxquelles s’ajoute le placement en rétention des personnes placées sous procédure Dublin, voté au parlement le 15 février.
- En fragilisant les fondements même du travail social, ce texte va altérer la relation de confiance entre les travailleurs sociaux et les personnes en grande précarité, leur famille et leurs enfants, qu’elles aient un statut administratif précaire ou non. Ces orientations pourraient conduire les personnes migrantes à fuir les procédures et les dispositifs sociaux, multipliant les situations d’errance et de précarité.
- En refusant d’avancer sur la question de l’accès à un titre de séjour pour les dizaines de milliers de personnes qui vivent déjà sur le sol français, parfois depuis des années, et sur la modification nécessaire du règlement Dublin, ce projet passe à côté d’une occasion de s’attaquer réellement à la pauvreté et à la souffrance sociale.
Les associations en appellent à la responsabilité des parlementaires pour modifier ce texte en profondeur, afin que soit définie une politique publique qui tienne compte de leurs propositions adaptées aux situations vécues par les personnes migrantes en France.
Signataires : Fédération des acteurs de la solidarité, Médecins du monde, Emmaüs France, Dom’Asile, France terre d’asile, L’Uniopss, JRS France, Centre Primo Levi, AdN, Le Refuge, La Cimade, Ligue des droits de l’Homme, Médecins sans frontière, Solidarité femmes, Unicef, CASP, Le Secours catholique – Caritas France, Association des Cités du Secours catholique, Fondation Abbé Pierre, Emmaüs solidarité, Armée du salut
Paris, le 21 février 2018

samedi 3 mars 2018

Hommage à Ghjuvanteramu Rocchi

«  Ghjuvanteramu si n'hè andatu. Tristezza profonda. Un immense poète, un humaniste, un vrai militant des justes causes s'en est allé. La ligue des droits de l'homme salue la mémoire de l'homme et partage le deuil de sa famille. Son engagement, sa parole mesurée, intelligente et lucide vont manquer à la Corse »

vendredi 2 mars 2018

POUR UNE RESPONSABILITE PARTAGEE : tribune signée par les membres du bureau de la section, publiée dans le Settimana de ce vendredi

Ces dernières semaines, ce qui devait être les prémices d’un dialogue s’est transformé en tensions. D’autres conflits pourraient survenir. Devant ces incertitudes, rappelons avec force qu’une majorité de Corses, au travers de plusieurs élections, ont fait le choix d’une autre relation entre la Corse et l’Etat, celle d’une responsabilité partagée. Nous pouvons mettre fin à une tutelle synonyme d’humiliation autrement que dans un face-à-face, en déployant un art nécessairement politique par lequel le peuple corse continue à s’inventer.

Dans l’immédiat, la revendication du rapprochement des prisonniers politiques y compris les détenus particulièrement signalés, demeure une condition nécessaire à l’apaisement. De même que l’inscription de la Corse dans la Constitution. Un échéancier a enfin été précisé par le Président de la République. Il revient au gouvernement et aux élus de trouver les termes qui permettront non pas de banaliser la Corse parmi les régions françaises, mais de garantir sa singularité. En ce sens, un pouvoir législatif peut être attribué à la collectivité de Corse.

Le respect de la singularité corse passe nécessairement par la prise en compte de la question linguistique. Affirmer qu’on parle français en Corse comme partout ailleurs sur le territoire national peut paraître du bon sens. C’est en fait relativiser l’existence d’un bilinguisme historique au détriment de la langue corse aujourd’hui en danger. En s’exprimant de la sorte, a contrario du bilinguisme qu’il entend promouvoir, l’Etat semble méprisant. Il est temps d’ouvrir un véritable dialogue sur la place de la langue corse en Corse et sur la reconstruction d’une société bilingue associant corsophones et non corsophones. 

La mise en œuvre de la collectivité de Corse constitue un enjeu de première importance.  La majorité territoriale a la responsabilité première de cette installation. Mais l’Etat ne peut se défausser. Le bon fonctionnement de l’Etat en Corse est tributaire du bon fonctionnement de la collectivité de Corse, et inversement.

La nouvelle organisation territoriale de la Corse interroge sur le risque d’une centralisation du pouvoir politique. Devant cette possible dérive, le conseil économique, social, environnemental, le CESE, et la chambre des territoires doivent jouer leur rôle de contre-pouvoirs. A l’instar du CESE, la chambre des territoires pourrait s’autosaisir de dossiers relevant de son champ d’intervention et contribuer ainsi à la délibération au-delà d’un simple avis.
Mais surtout, la mise en œuvre de la collectivité de Corse, au travers de la définition de ses politiques publiques, est l’affaire de tous les citoyens. Une démocratie délibérative reste à inventer. Avec la perspective d’un transfert d’une compétence législative à la collectivité de Corse, l’association des citoyens à la délibération sonne comme une évidence démocratique.

Face aux attaques qui se multiplient contre le PADDUC, il y aussi urgence à mettre en œuvre cette nouvelle démocratie. Le PADDUC n’est pas un « super PLU ». Il est un projet de société qui s’est construit à l’origine sur une forte mobilisation de la société civile contre la désanctuarisation de la Corse. Alors que se développent les inégalités sociales et territoriales, certains rêvent de davantage d’enrichissement personnel et d’un modèle entrepreneurial hégémonique, celui de la compétition et de l’efficacité dans la conquête des marchés, au détriment des solidarités et des protections pour tous.

Par leur vote, les citoyen-ne-s ont fait le choix de plus de droits et de libertés pour davantage de responsabilité. Mais il faut s’entendre sur le sens des mots. Plus de droits et de libertés ne signifient pas plus de pouvoir donné aux plus forts mais davantage de responsabilité collective.

Le droit au logement qui n’est pas le droit de propriété constitue de toute évidence une priorité. Il pourrait être une compétence de la collectivité de Corse, en cohérence avec ses compétences en matière d’aménagement et de développement économique. Le droit à la santé, l’accès aux soins pour tous, à juste titre régulièrement revendiqués par les syndicats et des collectifs de citoyens et d’élus sont une autre priorité.

L’artificialisation accélérée des sols constitue un défi majeur pour l’environnement, pour la préservation des terres agricoles et pour un équilibre entre les territoires. Il faut ici agir au plus vite. Plus généralement, il nous faut nous mobiliser contre les inégalités et pour un développement durable. Le principe d’une responsabilité sociale et environnementale doit être au fondement de l’action publique en tous domaines.

Nous vivons dans un monde mondialisé et interdépendant. Et dans ce monde-là, l’émergence de nouveaux espaces politiques infra et supra-étatiques ainsi que la constitution de firmes transnationales réduisent la vision d’un Etat seul souverain dans son palais à un mirage. Doit-on pour autant constater les migrations dangereuses pour les victimes de la guerre et de la misère, le saccage de notre environnement, le recul de la diversité culturelle et linguistique comme autant de fatalités ? Ce serait ignorer les résistances et les transformations à l’œuvre. Ce serait abdiquer toute citoyenneté et démissionner de nos responsabilités envers les générations futures. Le débat sur la Corse relève de cette dimension.

Le bureau de la LDH Corsica : Jean-Claude ACQUAVIVA, Marie-Anne ACQUAVIVA, Antonin BRETEL, Frédérique CAMPANA, Jean-François CASALTA, Jean-Sébastien de CASALTA, Francine DEMICHEL, Christine MATTEI-PACCOU, Ibtissam MAYSSOUR-STALLA, Gérard MORTREUIL, André PACCOU, Elsa RENAUT, Dumé RENUCCI, Sampiero SANGUINETTI

jeudi 1 mars 2018

Conférence de presse aux côtés de Jean-Marc Dominici et de Patrice Lepidi - Lire la déclaration de la LDH

La section présente aux côtés de Jean-Marc Dominici et de Patrice Lepidi lors de la conférence de presse à Bastia ce vendredi 2 mars. 
La direction des finances publiques leur réclame la somme exorbitante de 57 960 euros à payer sous trente jours sous peine de saisie de biens. Cette somme est réclamée au titre des dommages et intérêts dus à l'état suite à leur condamnation, en avril 2010, par la cour d'Assises spéciale de Paris.


TEXTE DE LA CONFÉRENCE DE PRESSE :
"Imaginez-vous un instant à la place de Jean-Marc et Patrice.
Vous recevez un courrier des Impôts. Vous l’ouvrez. Vous découvrez que l’administration fiscale vous réclame près de 60 000 - soixante mille euros. A payer dans le mois. Avec le droit à un recours qui n’en est pas véritablement un et qui n’est pas suspensif.
Imaginons ce qu’ont ressenti Jean-Marc, Patrice et leur famille face à cette violence.
Il y a quelques jours, lorsque nous nous sommes téléphonés pour cette conférence de presse et pour vous dire que la Ldh serait à vos côtés, l’un de vous m’a fait cette remarque : « Je comprends que des agriculteurs se suicident lorsqu’ils sont confrontés à des problèmes financiers qu’ils ne peuvent plus résoudre ».
Evidemment, il nous faut chasser cette idée morbide de nos esprits. Mais comment ne pas comprendre votre désarroi, votre colère. Car les conséquences de cette demande de l’administration fiscale sont simples : des familles seront plongées dans la grande difficulté financière, dans la précarité. Cette demande des impôts justifiée par un jugement de l’antiterrorisme est la porte ouverte à la pauvreté.
Dans cette affaire, dans votre affaire, Jean-Marc et Patrice, le temps n’est plus à la justice pénale. Il est à la justice sociale. Tel est le sens de notre présence à vos côtés aujourd’hui.
Que demandons-nous ?
De la part de l’administration fiscale d’apporter une réponse adaptée à votre situation.
Mais nous avons aussi une exigence politique : celle d’en finir avec l’antiterrorisme et ses conséquences aujourd’hui encore alors qu’il n’y a plus d’action clandestine depuis près de 4 ans.
Nous devons passer d’une revendication protestataire pour l’amnistie à une demande d’amnistie concrète, utile, nécessaire qui met fin au volet financier des condamnations prononcées dans le cadre de l’antiterrorisme pour les militants nationalistes.
Nous pouvons aussi poser la question du FIJAIT qui ne doit pas s’appliquer aux personnes ayant purgé leur peine.
C’est en ce sens que la LDH adressera un courrier aux présidents et aux élus de l’Assemblée de Corse leur demandant d’inscrire à l’ordre du jour des discussions engagées, certes difficilement, mais désormais engagées, avec l’Etat cette amnistie concrète, utile et nécessaire.
Il est temps d’en finir avec l’antiterrorisme, de tourner la page et de s’occuper de l’avenir de la Corse.
Nous avons tant à faire."

mercredi 21 février 2018

Rue Antoine SOLLACARO, hommage à l'homme et au militant des droits de l'Homme

Article de Corse-Matin 19/02 :







Extrait de l'hommage rendu à Antoine Sollacaro par André Paccou, pour la Ldh, le 3 février dernier :

"Désormais, Monsieur le Maire, lorsque j’arpenterai cette rue, mon regard évidemment se portera vers la plaque qui porte le nom d’Antoine. Et je verrai se dessiner, je vois déjà se dessiner son visage souriant, Antoine savourant une nouvelle victoire contre l’injustice, pour la dignité, celle d’avoir chassé des murs de notre bonne ville d’Ajaccio, un général qui fut un oppresseur pour les Corses. Une fois de plus, un coup de maître !"

mardi 13 février 2018

La Ldh Corsica apporte son soutien aux journalistes de France 3 Corse Via Stella menacés et empêchés d'exercer leur mission d’information ce mardi à Ghisonaccia. Nous ne construirons pas une société apaisée sans respect de la liberté de la presse.

dimanche 11 février 2018

Communiqué - Propos injurieux

 " La ligue des droits de l'homme condamne fermement les propos d'une violence extrême, insupportables, méprisants, tenus sur un réseau social, injurieux pour Madame ERIGNAC et pour toutes les femmes.
France 3 Corse Via Stella
Corsenetinfos
Rcfm
Le Monde.fr
Corse-Matin
Nice Matin .com
La Croix

jeudi 8 février 2018

Jean-François CASALTA, membre du bureau de la section, livre son analyse "D'une humiliation républicaine" suite à la venue du président MACRON en Corse

D’une humiliation républicaine

La rencontre n’a pas eu lieu.

La Corse attendait un Président girondin convaincu de la nécessité d’œuvrer à la solution politique d’un demi siècle de conflit, désireux, enfin, de prendre toute sa part à la construction d’une société insulaire apaisée.

Las ! Le Président Macron, autoproclamé du monde « nouveau » fut, pour trop d’entre nous, l’amère madeleine d’un temps que nous pensions à jamais révolu.

Aucune des revendications essentielles du peuple Corse, dont il nie l’existence même, validées par le suffrage universel à quatre reprises depuis décembre 2015, n’emporta son agrément.

La concession d’une inscription de la Corse dans le marbre constitutionnel, au rang du droit commun des régions, n’étant que l’obole consentie à la permanente solitude d’une main tendue.

Si le chef de l’Etat français s’est rendu en Corse les 6 et 7 février dernier, c’est uniquement pour rassurer les siens parmi lesquels on compte, pêle-mêle, la famille du préfet Erignac, Jean Pierre Chevènement, la famille Zuccarelli, Madame Castellani, Monsieur Mondoloni, Monsieur Marcangeli ainsi que tous ceux qui peuvent constituer une opposition à la majorité territoriale et un frein à la propagation, perçue comme virale, des idées nationalistes.

Il devait convaincre qu’« ici on est en France » ! Pour preuve  le nombre impressionnant de drapeaux français et européens dans la salle du centre culturel, et qu’il n’allait pas s’en laisser conter par des séparatistes déclarés ou insincères.

Mais de tout cela, il faut s’accommoder, en étant  persuadé que le travail entamé et à fournir ainsi que les combats à mener sauront venir à bout des résistances les plus farouches. 

L’absence de considération, le mépris, sont des flétrissures autrement plus douloureuses surtout quand elles ne sont pas ressenties personnellement mais par tout un peuple au travers de ses représentants démocratiquement élus.

Monsieur Macron avait peut-être le droit de tout refuser, le droit de passer sous silence le rapprochement des prisonniers politiques malgré la promesse faite la veille  à l’épouse de M.Colonna, celui d’exclure la co-officialité de notre  langue et d’écarter le statut de résident, celui de nous dire que nous étions comptables de nos mauvais résultats et responsables de la spéculation, celui de nous expliquer que le bilinguisme est une vertu, celui de nous annoncer la possibilité prochaine de téléphoner comme ailleurs et de nous offrir le bienfait de la « couverture réseau » comme jadis l’homme blanc jetait de la verroterie aux peuples indigènes, celui de vouloir jouer les apprentis-sorciers en souhaitant adapter les lois « Littoral et Montagne » ; M.Macron avait même le droit de nous expliquer, avec force détails, que la Corse est une île de Méditerranée.
Il avait encore  le droit de venir flanqué d’un ennemi déclaré de la Corse, génial décideur de la mise en place d’un préfet criminel qui commandita l’incendie de plusieurs établissement au prétexte du respect de l’état de droit.

Il avait enfin le droit d’exiger que le drapeau tricolore fut mis au fronton du grand hôtel.

Mais pesaient également sur lui  des obligations ; le respect d’autrui est pour chacun un devoir, fut il chef d’Etat.

De dire qu’il y a des choses qui « ne se plaident pas » pendant une commémoration aux côtés de la famille du défunt et devant l’ancien conseil d’Yvan Colonna, présent  en sa qualité de Président du Conseil Exécutif ; cela, il n’en avait pas le droit.
Refuser de se voir accueilli, à l’assemblée de Corse, par les conseillers territoriaux élus à une majorité absolue par le Peuple Corse, il n’en avait pas le droit.
Faire fouiller de manière humiliante des élus, y compris les  présidents du Conseil Exécutif et de l’Assemblée, qui se rendaient à son allocution, il n’en avait pas le droit.
Interdire que fut placée une seule Bandera  dans la salle de l’Alb’Oru où il prononça son discours, malgré  sa demande  d’un drapeau tricolore à l’assemblée de Corse et oubliant à dessein la Bandera qu’il plaça en arrière-plan à Furiani pour les besoins de sa campagne, il n’en avait pas le droit.
Ne pas réserver de places dans ladite salle pour les conseillers territoriaux, placer les Présidents et le Conseil Exécutif au 5ème rang après les avoir fait patienter debout, une quinzaine de minutes,  sous les regards curieux du public confortablement assis, il n’en avait pas le droit.

D’humilier la Corse en méprisant ses représentants, il n’en avait pas le droit au regard du principe sacré d’un respect dû à tous, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.

Mais loin de nous affaiblir, ce genre de blessure, qu’il faut évidemment relativiser au regard de tous les sacrifices consentis par les militants pendant ces années de conflit et aujourd’hui encore, nous renforce dans nos convictions et dans la pertinence des luttes démocratiques qui restent à mener dans l’intérêt supérieur du Peuple Corse, dont l’immanence réside dans le cœur et l’esprit de tous les habitants de ce pays, qui peut sereinement souffrir, pendant longtemps encore, le dédain de tous les Macron du monde.

JF Casalta

7 février 2018

mercredi 7 février 2018

Alta Frequenza

Visite d'Emmanuel Macron en Corse : la vision de la LDH Corse

Publié le 06/02/2018, 12h20
(Maria Lanfranchi - Alta Frequenza) - Le Président de la République est arrivé en Corse ce mardi afin de rendre hommage au Préfet Claude Erignac, abattu à Ajaccio il y a 20 ans jour pour jour. L’épouse du Préfet a prononcé un discours avant celui du chef de l’Etat. La cérémonie d’hommage s’est déroulée dans la rue Colonel Colonna d’Ornano devant des dizaines d’élus et de représentants de l’Etat. Un discours tranché qui laisse peu de place à la saisie de la main tendue avancée notamment par les élus de la majorité territoriale, trois des quatre députés mais aussi des élus d’autres sensibilités ou représentants de la société civile. Une prise de position, celle d’André Paccou pour la Ligue des Droits de l’Homme de Corse. L’heure n’est plus aujourd‘hui au conflit mais bien à la réconciliation a-t-il dit. Mais pour cela il faut que la volonté de dialogue s’opère des deux côtés de la Méditerranée. D’importants faits démocratiques se sont déroulés en Corse ces dernières années a dit André Paccou, et l’Etat n’a pas le droit de les ignorer.